Le soya et les hormones, mythe ou réalité ?

Par Myriam Beaudry

Par Myriam Beaudry, Nutritionniste-Diététiste

Originaire d’Asie orientale, le soya est une légumineuse riche en protéines et en fibres. Cette dernière est à la base de nombreux produits au cœur de l’alimentation végétalienne : la boisson de soya, le tofu, le tempeh, la protéine végétale texturée et les edamames pour n’en nommer que quelques-uns. Malgré sa grande polyvalence en cuisine et son profil nutritionnel intéressant, le soya est un aliment dont la consommation suscite fréquemment des craintes. Plus spécifiquement, beaucoup de croyances circulent au sujet de potentielles interactions avec les hormones sexuelles et des effets associés sur la santé. La consommation de soya augmente-t-elle le risque de cancer du sein ? Qu’en est-il des effets sur la ménopause pour les femmes ? Les hommes vont-ils développer une poitrine plus forte en commençant à boire de la boisson de soya ? Les produits de soya méritent-ils cette mauvaise presse ? Démystifions le tout !

D’où viennent ces inquiétudes ?

D’abord, tous ces questionnements proviennent du fait que le soya contient des phytoestrogènes, soit des molécules ayant une structure similaire à celle des œstrogènes.  Ces dernières sont des hormones sexuelles impliquées principalement dans les fonctions de reproduction, mais aussi la cognition, la santé cardiovasculaire et osseuse. Les femmes ont des niveaux sanguins d’œstrogène nettement plus élevés que les hommes qui eux, ont des niveaux de testostérone plus élevés que les femmes. Bien que l’œstrogène soit une hormone essentielle pour plusieurs fonctions dans le corps, des niveaux trop élevés ont été associés au développement de certaines maladies, dont le cancer du sein. Ainsi, puisque les phytoestrogènes ont une structure très semblable à celle des œstrogènes, certains émettent la crainte que la consommation de soya puisse mimer les effets de l’œstrogène et augmenter les risques associés à des taux élevés.

Ces craintes sont-elles fondées ?

Bien que cette idée puisse sembler logique, les études s’étant penchées sur cette question indiquent que les phytoestrogènes dans le soya n’agissent pas de la même façon que l’œstrogène dans le corps. Pour l’illustrer, j’aime utiliser l’analogie de la clé et de la serrure. Pensez à votre trousseau de clés. Vous avez peut-être deux clés ayant une forme similaire et avec laquelle vous vous mélangez constamment pour ouvrir une porte. Bien qu’elles se ressemblent, seulement une des deux clés peut ouvrir la porte en question. Il est peut-être possible d’insérer la seconde clé dans la serrure, de la remuer légèrement, mais seule la bonne clé peut faire son action complète, soit de débarrer la porte. Puis, lorsque la seconde clé est insérée dans la serrure, il sera bien entendu impossible d’insérer la bonne clé à ce moment pour débarrer la porte. Ainsi, ce n’est pas parce que les deux clés se ressemblent qu’elles ont le même effet. C’est essentiellement la même chose avec les phytoestrogènes dans le soya et l’œstrogène ! Les phytoestrogènes n’ont pas la même action que l’œstrogène dans le corps. En fait, les phytoestrogènes auraient plutôt des effets protecteurs pour la santé. En effet, ils ne se fixent pas aux mêmes récepteurs d’œstrogène étant problématiques dans le cas du cancer du sein et ceux qui le font exercent une action 100 fois moins importante que les œstrogènes produits par le corps. Au niveau des récepteurs dans le sein, les phytoestrogènes auraient une action dite « anti-oestrogènique » qui limiterait la prolifération des cellules cancéreuses. Ainsi, la consommation de soya est en fait associée à une diminution du risque de cancer du sein chez la femme et même une diminution du risque de récidive et de mortalité pour les survivantes. Par ailleurs, plusieurs études ont documenté d’autres effets bénéfiques liés à la consommation de produits de soya, tels que le tofu, le tempeh et les edamames. Elle serait associée à une plus faible incidence de maladies cardiovasculaires, de diabète de type 2, du syndrome métabolique et de certains cancers, dont celui du sein, de la prostate et des ovaires. Plus encore, chez les femmes traversant la ménopause, la consommation de soya pourrait avoir un effet bénéfique au niveau des bouffées de chaleur et des sueurs nocturnes. Pour les hommes, les phytoestrogènes n’interagiraient pas avec leurs hormones sexuelles et donc, nul besoin d’aller acheter un soutien-gorge à son copain qui commence à consommer du tofu et de la boisson de soya.

Les produits de soya ne sont-ils pas remplis d’OGM ?

Une autre inquiétude fréquemment associée à la consommation de soya est la présence d’organisme génétiquement modifié (OGM). Le sujet des OGM mériterait un article entier et est assez complexe en soi. De plus, bien qu’un portrait négatif soit dépeint des OGM, les conclusions quant à leurs effets sont loin d’être tranchées au couteau et ils seraient loin d’être aussi nocifs pour la santé que ce que laisse penser la croyance populaire. En attendant, en ce qui a trait aux produits de soya que nous consommons (tofu, tempeh, miso, etc.), les semences de soya destinées à la consommation humaine ne contiennent aucun OGM. Ce sont les cultures destinées à l’alimentation des animaux d’élevage qui en ont.

Finalement, puis-je manger du Tofu parfait sans m’inquiéter ?

Absolument ! En somme, la consommation de produits de soya est tout à fait sécuritaire et comporte en plus des effets bénéfiques pour la santé, tant chez les femmes que les hommes. Le soya est une protéine complète, peu coûteuse et permettant de réaliser de délicieuses recettes en cuisine ! Cette légumineuse a tout à fait sa place au sein d’une alimentation savoureuse et équilibrée.

P.S. : La section Tofu et tempeh du blogue regorge de recettes à essayer !

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4 Commentaires

Serge Sigouin juillet 28, 2021 - 5:03 am

Merci de démystifier le soya. C’est fou comment les mythes ont la vie dure. Et aussi, il faut se questionner sur la compétence professionnelle des gens qui propagent ces mythes, car ils se présentent souvent comme des spécialistes de la santé.

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Katia Bricka août 5, 2021 - 6:57 pm

Tout a fait ! Il est important de se renseigner correctement !

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Marisol Roldan mars 10, 2022 - 12:08 am

Merci pour ces clarifications, mais je ne vois pas les sources scientifiques dont vous parlez. Il serait intéressant de les avoir 🙂
Bonne soirée!

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Katia Bricka mars 11, 2022 - 2:19 pm

Les mots en rose sont tous des liens vers les sources :).

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